Romans


Eugène Savitzkaya

Mentir


1977
104 pages
ISBN : 9782707301505
18.00 €


Court roman de l'absence, de l'effacement, du dérisoire apparent, Mentir donne l'occasion à un lointain narrateur à la mémoire incomplète d'évoquer sa propre enfance. Est-ce la sienne du reste ? On ne saurait le dire avec précision. Un seul personnage, la mère, va et vient dans une sorte de perpétuel ennui. Mais cet ennui, curieusement, semble fait d'anciens souvenirs qui désagrègent le quotidien. Le temps s'arrête, dirait-on. La mère, du pré à la chambre, cherche l'un ou l'autre objet, prépare une valise, annonce son prochain départ. Souvent, le narrateur rapporte ces menus événements, à la fois grandioses et inexistants, d'un ton détaché, monocorde. Et l'on serait amené à croire que tout cela lui importe peu, si l'on n'avait pas la certitude qu'il mentait. Dès les premières pages, l'on sent qu'il feint l'indifférence. La profusion même des détails qu'il donne le trahit. Il s'obstine à répéter la même phrase, à la transformer à peine, pour la reprendre telle quelle. Pourquoi s'acharne-t-il à observer le personnage du récit ? C'est qu'il livre le portrait, à la fois flou et minutieux, de sa propre mère qu'il tente de comprendre au-delà de son amour présent, en une sorte de remontée du temps.
Mentir serait la pitoyable biographie d'une femme très ordinaire qui cherche à sortir d'elle-même, qui s'invente une panthère comme compagne, rêve de Smolensk ou de Santander. À moins qu'il ne s'agisse de l'épopée d'une fabuleuse héroïne.

ISBN
PDF : 9782707337498
ePub : 9782707337481

Prix : 12.99 €

En savoir plus

(Le Monde, 1977)

« Le court récit d'Eugène Savitzkaya nous offre le portrait d'une mère et nous prévient qu'elle pourrait, bien entendu, être quelqu'un d'autre. Il nous appartient, au cours de cette prose qui n'exclut ni l'attendrissement ni la facétie, de compléter cette esquisse, ou de l'écarter, ce que l'auteur accepterait avec bonne humeur, sa seule ambition avouée étant de nous énerver, donc de nous rendre complice. Pour goûter au mensonge, il faut être au moins deux. Eugène Savitzkaya réussit à créer une sympathie indiscutable. »

(La Quinzaine littéraire, 1977)

« C'est un poème en prose, où se délivre l'amour de celle qui vous mit au jour et puis un jour aussi s'en fut. Pour dire cela qui peut à peine se dire, et le dire ne peut être que de l'ordre du Mentir, mais se taire serait une traîtrise plus grave encore, pour dire cela donc, Eugène Savitzkaya se donne une phrase fluide, répétitive, débarrassée des outils de l'abstraction et de l'explication, une phrase aérienne, qui s'écoule et qui s'envole, et qui vous prend, et qui vous tient. Sa phrase a la saveur insistante et insaisissable des données primordiales de la vie, quand les organes des sens et des rêves peuvent encore en jouir, par la grâce du locuteur éperdu.
La voix qui constitue ce livre, la voix qui dit je et qui dit elle, la voix qui dit et redit, après bien d'autres et avec un accent personnel, ce de quoi nous sommes faits, et la fêlure, cette voix, il vaut de l’entendre. »

(Esprit, 1977)

« À force d'accumuler, Eugène Savitzkaya croyait pouvoir reconstituer son puzzle, mais il restera “ Gros Jean comme devant ” : si les fragments de son jeu s'imbriquent les uns dans les autres, ces fragments sont issus de boites différentes : quand les pièces sont jointes nulle image apparaît. La confusion demeure, confusion voulue et que l'auteur a su parfaitement traduire. L'image a disparu, L’image éclate : cette mère qu'il recherche, sujet central du roman, devient une héroïne problématique, absence, latence. »

(Art Press, 1977)

« Le talent particulier de Savitzkaya, ici, est dans sa façon de faire de la langue l'objet poétique de son écriture, de son désir, d'en faire un objet tissé à l'imaginaire en tant que lieu de relation à un espace maternel. »

 




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