André Dalmas (Le Monde, 1969).
Publiés simultanément, ces deux récits [Interdit de séjour et Portrait d'homme couteau] découvrent à la fois une technique savamment élaborée et un talent original au service d'une sensibilité très subtile, curieuse, et même audacieuse dans le secret de son cheminement. Car ce qui est tout à fait neuf dans les ouvrages de Tony Duvert, c'est la transformation subie par la notion de temps romanesque. Présent et passé, mêlés dans le récit, sont en réalité, et en même temps, le présent d'hier et celui d'aujourd'hui, le passé d'hier et celui d'aujourd'hui. Si bien que les choses, les êtres, révèlent, à tout instant, en même temps que leur nature, les stigmates de leur vieillissement, ceux de la ruine, de la décomposition et de la mort.
Ces métamorphoses ne sont pas seulement phénomènes d'écriture. Elles sont au service d'une éthique particulière, celle du mal (le crime, le viol, l'homosexualité), d'un mal qui, devenu mythe, avec son rituel et sa liturgie d'images, dissimule par son décor la décrépitude et la mort. Portrait d'homme couteau est placé sous le signe d'Henri Michaux : Couteau depuis le haut du front jusqu'au fond de lui-même, il veille. Le livre est l'évocation du viol et du meurtre d'une petite fille.
D'un genre différent, plus que scabreux et cru, Interdit de séjour se présente comme la longue odyssée funèbre de l'homosexuel, à la fois individu et foule, mais protégé quand il se trouve au sein de cette foule. [..] Récit ininterrompu de ces randonnées nocturnes où lieux et villes ouvrent, devant les yeux du narrateur, des abîmes d'étrangeté.
Du même auteur
- Récidive, 1967
- Portrait d’homme couteau, 1969
- Le Voyageur, 1970
- Paysage de fantaisie, 1973
- Le Bon sexe illustré, 1974
- Journal d’un innocent, 1976
- Quand mourut Jonathan, 1978
- L’Enfant au masculin, 1980
- Un anneau d’argent à l’oreille, 1982
- Abécédaire malveillant, 1989