Pierre Klossowski
La Révocation de l’Édit de Nantes
avec une illustration de l’auteur en frontispice
1959
188 pages
ISBN : 9782707302090
19.00 €
Dans son cahier de libre examen , Roberte se livre à une introspection psychologique et morale. Appartenant à la haute bourgeoisie, député radical et responsable de la Commission de la censure, elle a pour habitude de tenter des inconnus par des poses inconvenantes. Tantôt en quête d'aventures dans l'autobus, tantôt s’exhibant à de jeunes néophytes, elle ne fait que répondre aux désirs de son époux. En même temps qu’elle se fait payer pour l’initiation de ses amants , elle devient la tutrice irréprochable d’Antoine, son neveu, dont le précepteur sera Vittorio, qui lui communique bientôt le goût de se faire fesser et frapper à coups de ceinturon. Ces récits s’entrecroisent avec ceux du journal intime d’Octave, époux et complice de Roberte, qui tient le catalogue d’une collection de tableaux et commente ceux de Tonnerre, peintre pompier imaginaire du XIXe siècle : il prend plaisir à reconstituer ces toiles sous forme de tableaux vivants dont Roberte est souvent le modèle.
Patrick Gourvennec.
La Révocation de l’édit de Nantes est une mise en parallèle des journaux intimes de Roberte et d’Octave. À propos de cet ouvrage, il est naturel de parler de la liberté d’entrevoir avec perversité le passage qui conduit de la notion de profanation à la nécessité de resacraliser ce qui est donné, comme à portée de la main. Certes. Mais là n’est pas l’aspect le plus séduisant du récit de Pierre Klossowski. C’est, en revanche, le retour méthodique à la fiction, la description minutieuse du va-et-vient incessant de l’obsession de l’art à la scène brutale, imaginaire, recomposée au ralenti comme un tableau vivant : l’utilisation d’un matériel convenu, comme le gant ou la gaine, tels qu’ils apparaissent sur les panneaux d’affichage ou les magazines populaires, qui ronge le comportement des êtres ; enfin, des coins d’ombre de Paris, nostalgiques, des zones capitales de silence, où la vie difficile serait pratiquement libre, et rendue possible la réflexion dangereuse pour l’esprit, grâce à des exemples de parfaite déroute. Voici encore de quoi faire rêver. (Dictionnaire des œuvres, Laffont, Bouquins , 1994).