Herbert Marcuse
L’Homme unidimensionnel
Études sur l’idéologie de la société industrielle
Traduit de l’anglais par Monique Wittig et l’auteur
1968
Collection Arguments , 288 pages
ISBN : 9782707303738
19.00 €
L’homme unidimensionnel de la société avancée a perdu sa puissance de négation, sa possibilité du grand refus. La société absorbe les oppositions et présente l’irrationnel comme étant rationnel. Il s’agit par conséquent de démasquer la fausse conscience unidimensionnelle qui voit dans la technique manipulée un inévitable destin de la productivité, de l’allègement du fardeau de la vie.
‑‑‑‑‑ Table des matières ‑‑‑‑‑
Préface
Introduction : L’engourdissement de la critique : une société sans opposition
La société unidimensionnelle : 1. Les formes nouvelles de contrôle – 2. L’enfermement de l’univers politique – 3. La conquête de la conscience malheureuse : une désublimation répressive – 4. L’univers du discours clos
La pensée unidimensionnelle : 5. La pensée négative : mise en échec de la logique de la contradiction – 6. De la pensée négative à la pensée positive : la rationalité technologique et la logique de la domination – 7. Le triomphe de la pensée positive : la philosophie unidimensionnelle
Perspectives d’un changement historique : 8. La philosophie et son engagement historique – 9. La catastrophe de la libération –10. Conclusion
‑‑‑‑‑ Extrait de la préface ‑‑‑‑‑
Il est d’une importance qui dépasse de loin les effets immédiats que l’opposition de la jeunesse contre la société d’abondance lie rébellion instinctuelle et rébellion politique. La lutte contre le système, qui n’est portée par aucun mouvement de masse, qui n’est impulsée par aucune organisation effective, qui n’est guidée par aucune théorie positive, gagne dans cette liaison une dimension profonde qui compensera peut-être un jour le caractère diffus et la faiblesse numérique de cette opposition.
(Février 1967)
Pierre Viansson-Ponté (Le Monde, 1968)
Herbert Marcuse un philosophe qui réconcilie Marx et Freud
L’homme est sympathique, ouvert, plein d’humour. Avec lui, on se sent tout de suite de plain-pied, en confiance. À soixante-dix ans, professeur de sciences politiques à l’université de Californie, à Son-Diego, après avoir travaillé ou enseigné à Columbia, à Harvard et à Brandeis (Boston), il possède au plus haut degré cette sorte d’assurance souveraine et de paisible fermeté que, donne un destin désormais accompli. Issu de la bourgeoisie juive cultivée de Berlin peu avant le siècle, il a intensément vécu, étudiant, la révolution allemande de 1918, militant ardemment dans le parti social-démocrate. Il a été l’élève d’Edmond Husserl, fondateur de la phénoménologie, a fait sa thèse de doctorat à Fribourg-en-Brisgau sous la direction de Martin Heidegger, père de l’existentialisme, une thèse sur Hegel.
Il avait cessé depuis plus de dix ans déjà de militer quand il a vu la révolution allemande de son adolescence déboucher froidement sur le nazisme et la voie communiste, qu’il avait un moment hésité à choisir, conduire au stalinisme. Réfugié quelques mois en Suisse, il a gagné alors en 1933 les États-Unis, où il a parcouru le “ cursus honorum ” universitaire. construisant pierre à pierre ses thèses, qui vont lui valoir une notoriété mondiale, exprimées dans une dizaine d’ouvrages écrits tantôt en allemand, tantôt en anglais. Il maîtrise également le français, le russe, l’italien et l’espagnol.
Ce sont surtout deux de ses livres, Eros et Civilisation – paru en 1955 à Boston puis à Berlin et en 1963 en traduction française – et L’Homme unidimensionnel, publié aux États-Unis et en Allemagne en 1964, et qui vient d’être traduit, qui ont établi son influence. Le premier, réconciliant Marx et Freud, fait la liaison de la libération sexuelle apportée par la psychanalyse avec le marxisme révolutionnaire. Le second, vigoureux réquisitoire contre l’idéologie de la société industrielle avancée, conclut sur cette formule de Walter Benjamin : “ C’est seulement à cause de ceux qui sont sans espoir que l’espoir nous est donné. ”