Le sens commun


Robert Castel

La Gestion des risques

De l’anti-psychiatrie à l’après-psychanalyse


1981
Collection Le sens commun , 228 pages, épuisé
ISBN : 9782707305947


Au cours de la dernière décennie, deux systèmes de représentations ont paru dominer le champ médico-psychologique : celui d’une psychiatrie sociale qui, s’arrachant au ghetto asilaire, allait épouser enfin son siècle ; celui d’une psychanalyse qui proposait un modèle indépassable d’exploration du sujet.
Pendant que ces débats bruyants occupaient le devant de la scène, de nouvelles technologies s’installaient et prenaient date. Que nous entrions, d’une certaine manière, dans l’après-psychiatrie et dans l’après-psychanalyse ne signifie évidemment pas que les pratiques qu’elles inspirent encore soient périmées ou dépassées. Mais elles sont entrées en crise, leur systématicité se fissure, l’imaginaire qui les supportait s’affaisse, et leur apport est désormais banalisé au sein d’une nouvelle configuration qu’elles ont cessé de maîtriser. La psychiatrie rentre dans le giron de la médecine et la psychanalyse se noie au sein d’une culture psychologique généralisée qu’elle a contribué à promouvoir.
Un réseau beaucoup plus complexe d’activités d’expertises, d’évaluations, d’assignations et de distribution des populations, mais aussi de travail sur la normalité est maintenant à décrire. Il représente une nouvelle formule de gestion du social organisé autour d’un pôle centralisé de prévention des risques et d’un pôle convivial de prise en charge des fragilités. À la limite, un couple fonctionnel informatisation-psychologisation. L’ordre post-disciplinaire qu’il dessine passe moins par l’imposition des contraintes que par la programmation de l’efficience. Une subjectivité travaillée par les nouvelles psycho-technologies n’a plus d’autre objectif que sa propre culture et se trouve de ce fait disponible pour toutes les planifications technocratiques.
Saurons-nous maintenant maîtriser ces dispositifs qui se sont mis en place ces dernières années à la faveur d’une restructuration de la société française selon un plan de gouvernementalité néo-libéral ?

‑‑‑‑‑ Table des matières ‑‑‑‑‑

Présentation

Chapitre I : Mythes et réalités de l’aggiornamento psychiatrique
1. Grandeurs et servitudes contestataires. L’imaginaire de la libération – Psychanalyse et tabou – Limites de l’anti-psychiatrie
2. La résistible ascension du réformisme. La restructuration de la profession – Un nouveau dispositif institutionnel – L’expansionnisme psychiatrique
3. Un principe de non-choix. Dépasser ou réformer l’asile ? – Prévenir ou réparer ? –  Service public  ou contrôle social ? – L’enfance, premier ou dernier des soucis ? – Unité théorique, ou consensus tactique ?
4. Le désenchantement. Un bilan décevant – Inerties et résistances – Les orphelins d’un mythe

Chapitre II : La médicalisation de la santé mentale
1. La crise de la  médecine spéciale . Nouveaux philanthropes et premiers technocrates – La banalisation institutionnelle – De l’institution spéciale aux institutions spécialisées – L’homogénéisation professionnelle
2. Malaise dans la clinique. La victoire d’un outsider – Un miraculeux remède – Trop beau pour être vrai
3. Le retour de l’objectivisme médical. Un changement d’imaginaire professionnel – La recherche biologique – La thérapie comportementale – Un nouveau paradigme

Chapitre III : La gestion prévisionnelle
1. De la prise en charge à la gestion administrative. Un nouveau dispositif juridico-administratif – De la maladie au handicap – L’expert masqué
2. La gestion prévisionnelle des profils humains. La constitution des profils – De la programmation des équipements à celle des populations – Mieux vaut prévenir que guérir
3. La nouvelle politique sociale. Dirigisme et convivialité – Centralisme et différenciation – De la dangerosité au risque – L’objectivisme technologique

Chapitre IV : La nouvelle culture psychologique
1. La déstabilisation de la psychanalyse. Une culture psychanalytique de masse – La crise de l’orthodoxie – Héritiers et bâtards
2. Travailler le capital humain. Le travail sur la normalité – La promotion du relationnel – La vie de réseau
3. Une a-sociale-sociabilité. Le social n’est plus ce qu’il était – L’objectivité du psychologique – Narcisse libéré, ou Prométhée enchaîné ?....

Conclusion : Vers un ordre post-disciplinaire ?
La bipolarité objectivisme-pragmatisme – Changement technologique et histoire

Références bibliographiques – Index 

Roger Gentis (La Quinzaine littéraire, 1er avril 1982)

L’évolution récente de la psychiatrie
 
 Nul à ma connaissance n’était mieux qualifié que Robert Castel pour analyser l’évolution récente de la psychiatrie en France. En deux cents pages, cette analyse est un modèle de clarté et de concision, on l’apprécie en songeant aux pavés que sur un tel sujet d’autres n’eussent pas manqué de nous balancer.
L’affaire est en effet fort complexe. Il y a seulement vingt ans, la situation- de la psychiatrie en France, comme d’ailleurs dans la plupart des pays occidentaux, était relativement simple : quelques centaines de psychiatres “ publics ”, plutôt marginaux par rapport au corps médical, et pour la plupart mal dégagés des murs de l’asile, représentaient l’essentiel de la profession. Aujourd’hui, la psychiatrie semble en passe de réussir son intégration à la médecine et, si le nombre des psychiatres du secteur public s’est multiplié par trois ou quatre (il atteint aujourd’hui 1 500), ils sont néanmoins devenus très minoritaires, les psychiatres d’exercice privé étant, eux, plus de 3 000... Les psychiatres publics effectuent environ un million d’“ actes ” par an, les psychiatres privés quatre millions... et l’on considère que “ 74 % des interventions concernant la santé mentale sont effectuées par des généralistes ou des spécialistes autres que les psychiatres ” (p. 73).
À la démographie proprement médicale, il faut adjoindre celle des autres “ travailleurs de la santé mentale ” – psychologues, éducateurs, assistants sociaux, etc., sans oublier les infirmiers psychiatriques dont l’effectif, d’après le ministre de la Santé, M. Jack Ralite, qui le juge “ encore très insuffisant ”, serait actuellement de 72 000 (déclaration du 12 octobre 1981 à Sotteville-lès-Rouen). Le nombre des hospitalisés, lui, a sensiblement baissé : 120 000 en 1963, 107 000 en 1980 – mais, dans le même temps, le nombre des admissions annuelles est passé de 104 000 à 269 000.
Comment y voir un peu clair dans tout cela ? Au cours des dix ans qui ont suivi 1968, la lutte contre l’asile a occupé le devant de la scène, et le tapage antipsychiatrique a quelque peu détourné l’attention de ce qui se mettait en place en catimini. C’est ainsi qu’on réalise assez brutalement que ce     qui a désormais le vent en poupe, ce n’est plus la psychiatrie sociale, qui, sous la forme du “ secteur ”, a été pendant trente ans le cheval de bataille des psychiatres progressistes. Ce n’est plus la psychanalyse qui a pourtant marqué la psychiatrie en France comme dans aucun autre pays au monde. Ce serait plutôt – qui l’aurait cru ? – un retour en force de l’objectivisme médical le plus réactionnaire, allié aujourd’hui à toutes sortes de techniques manipulatrices travaillant le comportement ou les systèmes de relations. En même temps, la psychanalyse se dilue au sein d’une “ culture psychologique généralisée ” où s’enracinent toutes sortes de thérapies proliférantes et expansionnistes (ne conçoivent-elles pas la “normalité” comme quelque chose qui est également à traiter ?) dont le projet déclaré est presque toujours de “ développer le potentiel humain ”, d’améliorer le rendement de l’individu, de le rendre plus “ performant ” dans la sociabilité, le travail ou la jouissance ”... (p. 202).
On serait tenté de croire plus que jamais à cet impérialisme “ Psy ” dont on a longtemps agité l’épouvantail. Ce serait une erreur d’optique, dit Castel : le pouvoir “ psy ” reste limité, et il y aurait aujourd’hui quelque naïveté à le penser au service d’intérêts privés – ou d’une politique d’asservissement concertée. La question qui se pose, c’est de savoir si la diversité de ce qui se met en place sous nos yeux depuis quelques années, propulsé par le culte infantile des techniques, est susceptible de s’articuler en un dispositif cohérent de régulation sociale et de human engineering. Dans un chapitre central ( La gestion prévisionnelle ), Castel montre comment la restructuration de l’Action Sanitaire et Sociale (décret du 22 avril 1977), les nouvelles dispositions législatives en ce domaine (Loi d’orientation de 1975 en faveur des handicapés) et l’utilisation technocratique des ordinateurs débouchent directement sur un “ ordre post-disciplinaire ” où la gestion “ rationnelle ” des flux de population ne peut s’effectuer qu’en “ déconstruisant le sujet concret ” – dans l’intérêt général bien entendu –, en faisant éclater l’individu en facteurs et corrélations statistiques. Indispensable au déroulement de l’opération, le technicien “ psy ” n’y intervient pourtant que “ comme simple expert, c’est-à-dire qu’il établit le profil sans maîtriser la filière ” (p. 135).
Pendant près de deux siècles, notre société n’a connu que deux politiques à l’égard de la “ déviance ” : l’assistance et l’exclusion. “ La situation est aujourd’hui profondément modifiée en raison de l’émergence récente d’une troisième stratégie dont la vocation pourrait être aussi globale : il ne s’agit plus seulement, même s’il s’agit encore, de maintenir l’ordre psychologique ou social en corrigeant ses déviations, mais de construire un monde psychologique ou social ordonné en travaillant le matériel humain ; non seulement réparer ou parer à des déficiences, mais programmer l’efficience. Tel serait l’ordre post- disciplinaire qui ne passerait plus par l’imposition des contraintes, mais par l’aménagement et le management du facteur humain en fonction des figures nouvelles sous lesquelles se présente la nécessité sociale ” (p. 210).
Plus haut, Castel voit aussi “ une relation entre le resserrement de nouvelles formes de contrôles centralisés, à travers en particulier les systèmes informatiques, et le développement de secteurs en liberté sous surveillance, c’est-à-dire invités à auto-gérer les contraintes qui leur sont imposées ” (p. 207).
Vision d’un monde profondément dépolitisé, où le seul statut concédé au sujet est de se programmer en fonction des exigences de l’environnement : généralisation du faux-self de Winnicott – monde où un vaste corps de selves ayant fait la preuve de leur fausseté (dans le sens de l’adaptation, de l’efficacité, du pragmatisme) aideraient grâce à des techniques adéquates les autres selves à devenir suffisamment faux pour gérer eux-mêmes cette fausseté, et un peu à l’occasion celle de leurs voisins. À vrai dire, si nous regardons autour de nous, y compris dans les sociétés savantes, le processus semble déjà assez avancé. Et, comme dit Robert Castel dans la dernière phrase de son livre, on peut douter qu’il suffise d’un changement de majorité politique pour renverser la vapeur. 

Elisabeth de Fontenay (Le Nouvel Observateur, 3 avril 1982)

Le règne des psychocrates
Qui profite de la santé mentale des citoyens ?
 
“ Le philosophe peut aussi s’adresser au psychologue sous la forme d’un conseil d’orientation et dire : quand on sort de la Sorbonne par la rue Saint-Jacques, on peut monter ou descendre. Si l’on va en montant, on se rapproche du Panthéon, qui est le conservatoire de quelques grands hommes. Mais si l’on va en descendant, on se dirige sûrement vers la Préfecture de Police... ” Voilà ce qu’écrivait, en 1956, en ces temps archaïques où l’université de Paris détenait le monopole de l’enseignement psychologique, le philosophe Georges Canguilhem. Ce pressentiment épistémologique et politique d’une inévitable alternative entre progrès du savoir et maintien de l’ordre, le complice de Franco Basaglia et de Michel Foucault qu’est Robert Castel le vérifie depuis plus de dix ans avec un minutieux entêtement.
Ce travail de sociologue soucieux d’histoire et de philosophie, qui a commencé par une fracassante dénonciation de l’hégémonie psychanalytique et s’est poursuivi par une généalogie du système asilaire, achève momentanément son parcours dans un livre qui porte un titre terrible dans sa banalité, La Gestion des risques, où l’on constate que l’avertissement : il faut choisir entre collaborer à la libération et collaborer à l’aliénation, cette alternative, tel le cri de l’oiseau de Minerve, vient déjà après coup, pour ne pas dire trop tard. Car il existe, depuis longtemps, et aujourd’hui plus que jamais, une collusion entre le pouvoir politico-administratif et la plupart des pratiques qui ont la psyché pour objet. Ne dirait-on pas même qu’en vertu d’un maléfice originel les interventions scientifiques sur les forces obscures de l’individu se trouvent perverties par des stratégies qui les dépassent et les utilisent ? Si Robert Castel s’attache à décrire ces processus qui constituent l’inconscient de toutes les formes d’intervention psychique, s’il les analyse au fur et à mesure de leur formation et à chacun des lieux de leur apparition, ce n’est pas pour destituer systématiquement les métiers de la psychologie ou pour montrer qu’on évolue irréversiblement vers un misérable panpsychisme mais pour convaincre les professionnels d’ouvrir les yeux sur les implications sociales de leurs pratiques, de telle sorte qu’aucun d’entre eux, devant la récupération de ses techniques à des fins d’intégration politique ou d’exclusion sociale, ne puisse s’écrier : je n’ai pas voulu cela ! Tant est vrai, comme le veut Castel, avec cette obstination matérialiste et humaniste qui fait la force de son cheminement critique, que les hommes ont toujours affaire à de l’histoire en même temps qu’à leur histoire, qu’ils sont animaux civiques devant prendre leurs responsabilités, avant que d’être âmes ou corps pouvant être traités.
Point de départ, 1968, en quelque sorte le commencement de la fin, quand le narcissisme de l’accomplissement personnel envahit la vie publique, quand un imaginaire politique forgé dans les luttes sectorielles, en réaction contre l’approche structurale précédemment dominante, surdétermine le sujet, réconcilie “ révolution sociale ” et “ révolution personnelle ”, libération individuelle et libération des masses. Commence alors une inflation du politique qui va entraîner le rejet de la politique et laisser le champ libre à cette dissémination du psychologique dont Robert Castel ne cesse de vérifier le totalitarisme. Psychocratique sans doute, pouvait déjà être dite la politique de secteur mise en place à partir de 1960, en ce qu’elle permettait un interventionnisme généralisé et réalisait un quadrillage de la population : l’antipsychiatrie s’est inlassablement attachée à dénoncer cette emprise. Mais parce qu’elle s’est obnubilée sur cette forme-là de l’impérialisme psychiatrique, elle a méconnu et laissé s’installer des dispositifs autrement insidieux.
D’une semblable façon, le mouvement antipsychiatrique, tout à son idolâtrie de la folie et à son ressassement d’une critique unilatérale – alors qu’il aurait fallu et qu’il faut, comme le fait Castel, se battre sur tous les fronts –, n’a pas perçu le retour en force du positivisme médical, la remédicalisation de la santé mentale, qui est venue, autour des années soixante-dix, menacer les précieux acquis d’une approche spécifique de “ ces maladies pas comme les autres ”. Administrant de nouveaux médicaments, pratiquant des thérapies comportementales, l’aggiornamento psychiatrique renvoie désormais “ aux oubliettes de l’histoire les efforts pour saisir le sujet souffrant dans son rapport problématique au sens, au langage, au symbolique et aux autres ”. Ainsi l’auteur du Psychanalysme, qui dénonçait jadis l’hégémonie psychanalytique et plus généralement la réduction des rapports sociaux aux relations thérapeutiques, peut-il, sans se renier, revenir “ au modèle freudien de l’écoute et de l’effort pour instituer une relation authentique ” : car il convient de se donner tous les moyens de lutter contre cet objectivisme qu’une hémorragie de subjectivisme a paradoxalement contribué à restaurer.
Mais le plus grave, le plus alarmant n’est encore pas là. Il se cache dans l’installation par l’administration, et au moyen de la psychiatrie, de dispositifs centralisés et informatisés qui permettent la gestion des populations porteuses de risques et même l’établissement prévisionnel de profils. Dans cette nouvelle configuration du savoir psychologique, la pratique soignante, la relation d’une équipe thérapeutique avec un individu souffrant est reléguée au second plan, alors que l’activité technocratique d’expertise confisque désormais l’activité médicale. Que fait l’expert ? Il évalue le handicap. Mais qu’est-ce au juste qu’un handicapé ? Cette nouvelle catégorie, officialisée par la loi de 1975, est un “ fourre-tout où l’on trouve pêle-mêle des inadaptés physiques, des débiles, des inadaptés sociaux, des délinquants, des toxicomanes, des malades mentaux, des alcooliques, des suicidaires, des asociaux ”. De la même façon, on établit des fichiers d’enfants à risque : croira-t-on que quinze pour cent de ces enfants présumés suspects le sont parce que nés de mères célibataires ? Dans cette vaste entreprise de gestion, on n’a plus du tout affaire à “ la prise en compte de sa pathologie, de la crise, de la rupture et du mystère de la différence et de la discontinuité ” mais à l’évaluation irrévocable du déficit et à l’assignation sociale de ceux qu’on découvre incapables d’accomplir les performances que la psychocratie érige en critères de normalité.
L’innovation la plus équivoque apparaît sans doute dans la banalisation de la maladie mentale, par extension systématique aux bien-portants des techniques d’assistance psychologique. On connaît désormais une promotion du psychologique pour lui-même : inflation sans contrôle théorique, dévergondage rentable. Ne s’agit-il pas aujourd’hui, et sans réserve, de “ travailler l’état de l’homme normal et l’étoffe de la sociabilité ordinaire ” ? Le syncrétisme sans foi ni loi de ces commerçants en biens psychiques se moque pas mal de la pureté doctrinale et de la rigueur méthodologique. Quant à la mise sur le devant de la scène des pures et dures querelles de l’orthodoxie lacanienne, elle n’a fait que cacher, derrière une tragi-comique dramatisation, une bien triviale réalité : la multiplication de ces techniques pragmatiques, opportunistes qui prospèrent d’autant plus qu’elles parviennent mieux à se placer sur un marché concurrentiel. Elles vendent, en effet, des moyens de parer au plus pressé, de “ colmater, manipuler, réduire la faille, ici et maintenant ”, vite, à peu de frais. Ainsi se répand l’idée d’une thérapie pour les normaux, qui permet de développer le potentiel humain en vue d’un supplément de jouissance ou d’une amélioration de l’efficience. Qui sont les bien-portants qui pratiquent bioénergie, Gestalt-thérapie, coconseil, analyse transactionnelle, cri primal et autres psychanalyses du pauvre ? Ce sont, on s’en doute, ceux qui se trouvent en rupture provisoire ou définitive avec les structures intégratives classiques que constituent le travail et la famille. Ce qui veut dire qu’on continue, aujourd’hui comme jadis, mais avec de nouveaux moyens, à faire de nécessité vertu, à changer ses désirs plutôt que l’ordre du monde et à trouver dans la dure loi de détresse l’occasion d’une expérimentation sur soi, laquelle rend disponible pour faire face à toutes les situations pouvant se présenter sur le marché de l’emploi. Car la vérité de l’homo psychologicus, c’est “ l’intérimaire permanent ”. Du coup, s’opère “ ce désinvestissement généralisé pour l’ordre public ” dont il serait niais de demander à qui, à quoi il profite.
On peut et l’on doit arrêter le progrès s’il se révèle que “ celui-ci s’est laissé confisquer par le changement technologique ”. La prise du pouvoir d’État par la gauche est une première victoire, sur les lauriers de laquelle il serait irresponsable de s’endormir car l’hydre n’en est pas à une tête près. 

 

Du même auteur

Poche « Reprise »

Livres numériques

Voir aussi

* Institutions totales et configurations ponctuelles , dans l’ouvrage collectif, Le Parler frais d’Erving Goffman (Minuit, 1990).
* Erving Goffman, Asiles, Études sur la condition sociale des malades mentaux, Traduit de l’anglais par Liliane Lainé, Présentation de Robert Castel (Minuit,1968)
Traduction :
* Herbert Marcuse, Raison et révolution. Traduit de l’anglais par Robert Castel et Pierre-Henri Gonthier. Présentation de Robert Castel (Minuit, 1968).




Toutes les parutions de l'année en cours
 

Les parutions classées par année