Jacques Hillairet
Dictionnaire historique des rues de Paris
Nouvelle édition mise à jour, avec le Supplément rédigé en collaboration avec Pascal Payen-Appenzeller inséré à la fin de chaque volume
1963
1 600 pages, 2 343 illustrations. Deux volumes reliés pleine toile, sous jaquette illustrée en quadrichromie, avec étui relieur pleine toile
ISBN : 9782707310545
Constamment mis à jour depuis 1963, le Dictionnaire historique des rues de Paris comprend : une histoire de la croissance de Paris, une série d’étude sur les particularités de la ville, une nomenclature complète des 5 334 voies, une histoire des rues, une histoire des maisons intéressantes et des personnages célèbres qui y ont vécu, une vaste iconographie : 2 200 gravures et photos, trois plans généraux : celui de Truschet et Hoyau (1551), le plan de Maire (1808) en vingt planches, le plan de Lecomte représentant le Paris actuel, un important appareil d’appoint.
Albert Mousset (Le Monde, 1963)
« Toutes les voies de la capitale, rues, ruelles, impasses ou sentiers, trouvent ici l’évocation de leur passé... Car l’auteur n’a pas voulu que son livre se limitât à une sèche nomenclature. Il s’est efforcé de lui donner une âme... Un livre qui fera date dans l’histoire de Paris. »
André Billy (Le Figaro littéraire, 1963)
« On attendait depuis longtemps un dictionnaire des rues de Paris où il serait tenu compte des dernières découvertes de l’archéologie parisienne et où seraient réunis, après vérification, les renseignements disséminés dans les publications antérieures... Le Dictionnaire de Jacques Hillairet a sur les précédents tous les avantages que devait lui conférer sa postériorité. Il a en outre celui d’être illustré de photographies et de gravures documentaires. C’est un monument considérable. »
Serge Sanchez (Magazine littéraire, mai 1995)
Sur les pas du colonel
« Curieux personnage, que Jacques Hillairet. Il est l’auteur du fameux Dictionnaire historique des Rues de Paris édité en 1963 par les éditions de Minuit et sans cesse réédité depuis. Il a 86 ans, en janvier 1972, quand Jean Daumas, de La Croix, vient l’interviewer. Le journaliste le décrit comme “ un petit homme aux yeux très vifs et au caractère enjoué ”, qu’il trouve attablé à la lecture des Aventures de M. Pickwick. “ À la retraite, les militaires jouent au bridge ou taillent des rosiers. Moi, j’ai écrit ”, lui explique le lexicographe avec ingénuité. Jacques Hillairet, de son vrai nom Auguste Coussillan, est né le 31 juillet 1886 à Commentry, dans l’Allier, où son père était receveur des Postes. Il a sept ans quand sa famille s’installe à Paris, rue Erard (Sébastien Erard – 1752-1831 – fut facteur de harpes et pianos).
“ Toute mon enfance s’est déroulée dans le Xlle arrondissement, explique-t-il à Jean Daumas. Mon père m’a promené dans la capitale (la rue Saint-Louis-en-l’Île paraissait bien longue à mes petites jambes !) en me racontant de passionnantes histoires. ” Tandis qu’Auguste découvre les rues du vieux Paris, un nouveau siècle débute. La ville se métamorphose. Boulevard Diderot, on abat les murs épais de la prison Mazas. Plus loin, on éventre la chaussée pour faire place au métropolitain. Sur la colline de Montmartre, surgissent les coupoles blêmes du Sacré-Cœur. En 1910, Auguste a vingt-quatre ans. Le voici employé au central télégraphique de la rue de Grenelle. En 1914, enrôlé dans les Transmissions, il est affecté à l’état-major de Gallieni. Il participe à l’organisation des taxis de la Marne et installe le téléphone dans les tranchées. Après la démobilisation, il reste dans l’armée. De 1924 à 1926, il enseigne les sciences appliquées et les transmissions à l’école de Cavalerie de Saumur. Il est ensuite affecté au ministère de la Guerre et installe le téléphone au Louvre. De 1930 à 1938, il est détaché comme “ ministre des Téléphones ” au Liban, qui est sous mandat français.
Mobilisé comme colonel en 1939, Auguste est fait prisonnier à Bohin (Nord) et passe l’hiver 1940 en Silésie. Libéré en 1941, il est mis à la retraite de l’armée et s’installe à Marseille. À la Libération, il regagne Paris et se loge au pied de Montmartre, dans l’appartement de l’ex-épouse de Maurice Chevalier. C’est alors qu’il trouve sa voie. Touché par la grâce de l’histoire anecdotique, il organise des conférences-promenades sur le vieux Paris. Et, “ pour que ses petits camarades de l’armée ne se paient pas sa tête ”, il rentre dans la clandestinité : le colonel Coussillan devient Jacques Hillairet (c’était le nom de jeune fille de sa mère). Pendant plusieurs années, l’ancien militaire promène les badauds de l’enceinte de Charles V au Mur des Fermiers généraux. Un jour, dans la maison de Marat, quelqu’un le prend à part et lui demande s’il ne veut pas écrire des livres sur le vieux Paris : c’est Jérôme Lindon, le directeur des Éditions de Minuit. En 1954, paraît Évocation du vieux Paris, qui sera suivi de Gibets, Piloris et Vieux Cachots et de Deux cents cimetières parisiens, autrement nommé par son auteur : « le Bottin mondain des morts ». Enfin, en 1963, c’est la publication du Dictionnaire historique des Rues de Paris. L’entreprise n’est pas nouvelle. En 1816, est paru le Dictionnaire topographique, historique et étymologique, de J. de la Tynna ; en 1844, le Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments, par les frères Lazare ; de 1858 à 1867, Charles Lefeuve a rédigé L’Histoire de Paris, rue par rue, maison par maison, sous forme de notices ; mais c’est le marquis de Rochegude, dont les Promenades dans toutes les rues de Paris sont publiées en 1910, qui est le véritable précurseur de notre colonel.
Le dictionnaire d’Hillairet se présente sous l’aspect de deux forts volumes in-4°, soit quinze cents pages de deux colonnes avec nombreux plans et photographies. La matière en est inépuisable. Il ravit promeneurs et poètes. On y apprend, parmi tant d’autres choses, que Mme de Pompadour repose sous la chaussée de la rue de la Paix, que la voie la plus longue de Paris est la rue de Vaugirard (4 360 mètres) ; la plus courte, la rue des Degrés (5,75 m.) ; la plus large, l’avenue Foch (120 mètres) ; les plus étroites, l’allée des Faucheurs et le passage de la Duée (0,60 m.). En 1963, Hillairet a soixante dix-sept ans quand Thérèse de Saint-Phalle vient l’interviewer pour Le Monde. Il la reçoit “ parmi les narguilés et les vocalises de sa fontaine, dans un salon mauresque tendu de tapis d’Orient ”, reliques des années passées à Beyrouth. Si le “ petit homme aux yeux très vifs ” aime les ailleurs, c’est que le temps présent ne lui dit plus rien qui vaille. “ Le présent ne m’intéresse pas, explique-t-il à la journaliste. Le béton n’a pas d’histoire. Dans de nombreuses années, pensez-vous qu’on écrira l’histoire de la Défense ? Le passé est passionnant (...) Mais je constate, au hasard de mes promenades, que le Paris de mon enfance se fait de plus en plus rare. ” En 1975, un autre journaliste du Monde rend visite à Jacques Hillairet, qui n’a rien perdu de sa ferveur pour les vieilles pierres. Le cœur de Paris vient d’être arraché : les halles sont un trou béant. Hillairet propose de les remplacer par un bois à la Lenôtre, avec bosquets, fourrés, charmilles, surtout “ pas un terrain presque nu, où l’on voit les pauvres amoureux à cinquante mètres ! ” Le colonel aura bientôt quatre-vingt-dix ans. Il vit à nouveau dans le quartier Bel-Air, qui fut celui de son enfance, et son dernier livre aura précisément pour sujet ce XIIe arrondissement où tout a commencé, il y a si longtemps. N’y voyons aucune coïncidence. Penché sur ses manuscrits, Jacques Hillairet revivait le bonheur lointain des années 1900, les premières promenades dans Paris, main dans la main avec son père. Ligne après ligne, c’est aussi le petit garçon de ce temps-là qu’il a secrètement sauvé de la destruction. Tel est peut-être le sens secret de toute une œuvre. »